A l'heure de l'adaptation des territoires au dérèglement climatique, la 4ème biennale des villes en transition de Grenoble proposait, lors d'une conférence, de se pencher sur les nouveaux mots et concepts de la transition, le 8 juin dernier. Du côté des mots éculés, on pourrait presque ranger désormais ceux de « transition » et « résilience ». Quel projet urbain ou secteur d'activité ne s'inscrit pas dans une dynamique de transition et de résilience ? « On parle même de la résilience du secteur automobile » soulignait, de manière ironique, Magali Talandier, professeure à l'Institut d'Urbanisme et de Géographie Alpine de l'Université Grenoble Alpes. Bien que mise à toutes les sauces, la « résilience » demeure toujours une approche intéressante aux yeux de la présidente du conseil scientifique « capitale verte et transition ». « Elle permet de réfléchir à la capacité d'un système complexe à faire face à un choc et d'attraper beaucoup de choses, les enjeux sociaux, politiques, économiques ». 

Loin de partager cet avis, le cofondateur du laboratoire Origens Medialab, Diego Landivar est convaincu que les concepts de résilience et de transition mènent droit dans le mur. « Ce sont des approches incapables de résoudre les problèmes écologiques, car elles ne remettent en cause que les moyens, pas la finalité » mettait en garde l'enseignant-chercheur. La solution, selon lui ? Adopter une démarche plus radicale et « lucide » répondant au nom de « redirection écologique ». Le principe consiste à identifier avec les citoyens les « besoins sacrés » sur un territoire pour mieux faire accepter l'idée de renoncer à certains équipements, services et pratiques moins essentiels. Le laboratoire Origens Medialab n'était pas invité, par hasard, à la biennale des villes en transition. La Ville de Grenoble a eu recours à ses services courant 2021 pour animer une série d'ateliers afin d'élaborer des projets sur les six secteurs de la ville.  Le laboratoire se penche notamment sur « la redirection des politiques sportives et d'aménagement dans plusieurs territoires ». « On travaille avec beaucoup de villes qui comprennent que tout ne peut pas se résoudre par des équations managériales, économiques et d’efficience » résumait ainsi Diego Landivar. 

Quant à l'architecte Matthieu Miet, membre de la convention des entreprises sur le climat, lui, promeut la notion d’« économie régénérative » qui, sans être nouvelle, n'est pas encore très appliquée. « Cela consiste à développer une économie et une ville qui aient des impacts positifs nets, car réduire les impacts négatifs comme on le fait aujourd'hui ne suffira pas » s'alarme l'architecte. Concrètement ? « Cela passe, dans le secteur de la construction, par la réhabilitation du bâti, en acceptant d'avoir moins à certains moments, dans l'esprit des refuges en montagne, conçus pour fonctionner en mode dégradé ».

Séverine Cattiaux