Lorsque le groupement Nexity, Eiffage Immobilier, CDC Habitat, Groupama et EDF est choisi en novembre 2019[1] pour aménager la partie sud du Village des athlètes à Saint-Ouen-sur-Seine, celui-ci s’engage à respecter de courts délais : Les Belvédères devront être livrés fin décembre 2023. À quelques mois de l’échéance, le directeur général du pôle Transformation des Territoires de Nexity, Jean-Luc Porcedo, assure « être dans les temps, sans journée de retard mais sans journée d’avance ». L’échelle de temps est primordiale puisque 2500 athlètes investiront le secteur E en juillet 2024. L’enjeu est de taille : faire de ce territoire « une vitrine réelle du savoir-faire français sur la scène internationale » souligne Éric Donnet, directeur général de Groupama Immobilier. Les développeurs espèrent recevoir sur le site le président de la République avant l’avènement des Jeux Olympiques afin de rendre honneur au « plus grand chantier monosite de France ».

Avant que le Village des athlètes et a fortiori, Les Belvédères, ne s’insèrent dans le paysage audonien, athlètes et para-athlètes s’y installeront à l’occasion des JO 2024. Les 527 logements sont réversibles et disposent de cloisons permettant de « créer, par exemple, deux chambres dans un salon et une autre dans ce qui deviendra ensuite une cuisine ». Onze mois de travaux seront nécessaires afin de changer la fonction des bâtiments, lesquels accueilleront les premiers habitants en 2025. Les 18 immeubles de logements proposeront 25% de logements sociaux, dont une résidence étudiante et une résidence sociale pour personnes handicapées, 28% de logements libres et le reste en logement locatif intermédiaire et logement abordable contractualisé. CDC Habitat est l’acquéreur de ces logements sociaux dont les plafonds de loyers se situeront entre 450 et 600 € et des logements intermédiaires décotés de 10 à 15 % par rapport au prix de marché.

Le nouveau quartier se raccordera au reste de la ville par une gradation des immeubles allant du R+5 au R+10. Ces derniers sont conçus en structure mixte béton et bois, à l’exception de celui en R+10, pour alléger le bilan carbone du projet. Le bois, issu à 80% des forêts françaises, est apparent dans les bureaux et appartements. Groupama Immobilier, investisseur du projet, salue à travers son directeur général Éric Donnet « l’association du groupe au choix des matériaux sur le site ». L’entreprise Dalkia, filiale du groupe EDF, est chargée d’installer des panneaux photovoltaïques produits en France qui couvriront 20 % des besoins énergétiques du quartier. L’optimisation de la consommation en énergie se poursuit avec deux innovations. La première analyse la qualité de l’air à l’extérieur comme à l’intérieur du bâtiment, et élimine la pollution via un système de filtration ; les plantes situées dans le hall d’entrée opèrent une filtration naturelle. La ventilation est autorégulée et permet de réaliser 17% d’économie d’électricité. La deuxième innovation consiste à relier le stockage d’énergie issue des panneaux solaires aux prévisions météorologiques ; les journées moins ensoleillées seront compensées par une captation plus importante de l’énergie solaire en amont. Cet outil réduirait de 15% la consommation électrique et générerait des gains financiers pour les habitants.

Les Belvédères sont pensés pour développer une vie de quartier. Les développeurs insistent sur l’inclusivité du site adapté « à tous les types de handicaps ». Le programme résidentiel sera complété d’un immeuble de bureau de 13 491 m² avec espace sportif en rooftop, une crèche de 452 m², des locaux d’activités ciblés vers l’artisanat, le numérique, le design, la jeunesse et l’entrepreneuriat, des commerces et restaurants. La salle de sport en rooftop proposera 3 demi-terrains de basket 3x3 accessibles à tous les habitants de la ville. Le projet réintroduit de la nature dans la zone avec des toitures végétalisées et 20% de pleine terre sous forme de pépinière de plantes sauvages et de jardins maraîchers. L’Atelier Georges, paysagiste du secteur, « a veillé à recréer un sol vivant et à installer un milieu naturel résilient à l’augmentation des températures ». En tout, sept agences d’architecture et d’urbanisme ont travaillé sur le site, chacune d’entre elles étant chargée de concevoir deux bâtiments.

Le secteur E est composé de cinq lots : E1 qui comprend 6 immeubles de logements, commerces et autres activités, dont 3 en R+9/10 et 3 en R+5/6, tous conçus par SOA Architectes et Lambert Lenack. L’un des bâtiments présente des balcons fabriqués en béton et soutenus par des tubes métalliques et des poutres en bois. La structure de E2, conçu par Koz Architectes, Atelier Georges et COBE, est identique à celle de E1. Le troisième lot, imaginé par DREAM, se caractérise par un immeuble de bureaux avec commerces ; le dernier étage, de plus grande hauteur et intégralement vitré, indique la salle de sport précédemment évoqué. L’agence Koz Architectes s’est vue attribuer la parcelle E4A pour y concevoir deux immeubles de logements en R+5/6. Enfin, E5 permet le développement de 4 immeubles de logements en R+5, avec des commerces et une crèche. Toutes les constructions intègrent des systèmes de plafonds ou planchers chauffants l’hiver[2], et refroidissants l’été. 

Les cinq entités répondent à un double besoin d’indépendance, avec des parkings souterrains séparés, et de cohérence architecturale : « l’unité du quartier se lit dans les tonalités des matières des façades, dans les camaïeux de couleur qui reprennent celles de la ville ancienne et industrielle. Le travail sur les espaces extérieurs y participe également ». L’enjeu de ce nouveau « morceau du Grand Paris » réside dans sa connexion à la ville de Saint-Ouen-sur-Seine. Ainsi, « la crèche a été déplacée à l’accroche du village ancien de Saint-Ouen et non pas sur l’axe principal comme prévu initialement. De même, un restaurant est placé en bord de Seine, autant d’éléments nécessaires à la réussite de la greffe avec le vieux Saint-Ouen ». L’équilibre entre la vieille et la nouvelle ville restera à prouver.

Pour l’heure, le groupement en charge du projet est fier de l’avancée des travaux ; « nous avons beaucoup travaillé pour respecter cette ambition de l’excellence française. Nous avons poussé les curseurs loin » déclare Jean-Luc Porcedo. Éric Donnet lui, encourage « d’autres projets à faire valoir cette exemplarité du partenariat public-privé ». Près de 6000 habitants afflueront en 2025 sur le Village, tourneront la page des Jeux de Paris et donneront vie à cette nouvelle ville dans la ville.

Théo Le Franc

 

[1] Par la SOLIDEO, le CSTB et SOCOTEC

[2] Bureaux et logements sont alimentés en géothermie l’hiver